La nuit déjà tombée, Grage est de retour dans le quartier.

Suivant sa guide, le massif Léodra se montre prudent de ne pas bousculer quoi ou qui que se soit sur son passage. Arrivée dans l'arrière pièce, le noiraud semble satisfait de prime abord de ce qu'il sent.

Regardant la matrone de son regard de carnassier, le guerrier reprend de sa voix grondante :

" Quel est le tonneau des bêtes que vous avez dépecées en dernier et avec un gros morceau de viande cru non épicé, ce sera combien ? "

Obligeamment, la matrone indique l'un des tonneaux fermés. Elle répond en même temps, sur un ton aimable bien que vulgaire :

"Nous avons just'ment d' l'ours comme viande fraiche, venue tout droit d' l'arène ! Ça f'ra cinq Besants d' plus !"

Au fait... quelles sont les richesses actuelles de Grage ?

" De l'ours. C'est de la bonne carne. Je prends "

Le Léodra sort 5 beuzans, puis 1 beuzan de sa bourse pour les tendre à la servante. Après quoi, le carnassier se dirige vers le tonneau indiqué pour débuter son festin. Avant de se faire, Grage cherche dans son sac ou dans la pièce des ustensiles qui vont lui permettre de ne pas se salir. Après quoi, il ouvre et inspecte le tonneau désigné, faisant attention aux premières vapeurs fortes. Viendra ensuite la sélection des premiers ingrédients qui se fait au flair, et du sang sera bu que si il est suffisamment frai.Grage prend son temps, histoire de ne pas se gaver en attendant son morceau de viande cru non épicé..

Grage doit disposer de ... ben je sais plus car tout est chez toi, sur une de mes feuilles de notes ;-), mais j'ai de quoi me payer une bonne vingtaine de repas comme celui la.

Au grand dépit de Grage, le sang a séché ou coagulé à l'intérieur de la barrique. Il y trouve de nombreuses sortes de viscères qui selon son odorat ne sont pas encore trop gâtées. Tandis qu'il commence à s'empiffrer, l'estomac grondant de ne pas avoir reçu de repas de la journée, la matrone revient avec un plat contenant un gros morceau de viande encore rouge.

Elle ne semble pas plus choquée que cela de voir le jeune homme-lion mastiquer de la tripaille crue.

"J' vous pose ça sur les barriques à côté !"

L'affamé regrette que le sang ne soit pas bon à boire. Cependant, prenant le temps de savourer les mets contenus dans la barrique, le carnassier prend le temps de manger lentement.

Terminant la mastication en cours, le noiraud acquiesce d'un signe de tête à la matronne qui vient de rentrer. La bouchée avalée avant que la servante n'ai le temps de sortir.

" Peux-tu me ramener un linge et un seau d'eau ? histoire de ne pas sortir avec la gueule pleine de sang devant les âmes sensibles qui remplissent ton auberge. "

"A vot' guise, champion !", répond la matrone sur un ton enjoué.

Elle revient un peu plus tard avec une cuvette de céramique emplie d'eau et un torchon propre.

"Et avec ça, voulez pas un truc à boire pour faire passer ? C'est la maison qui offre !"

Le convive, qui se régale, alterne les abats et la viande crue. Au retour de la servante. il affiche à nouveau un sourire carnassier.

" C'est pas de refus. Une spécialité de la maison, je te laisse décider . "

Puis le noiraud continu son repas.

La matrone s'en va et revient peu de temps après en tenant un pot de terre cuite fumant. A l'odeur qui en émane, Grage peut reconnaître un vin chaud lourdement chargé d'épices.

"Et voilà !", déclare la matrone pleine d'entrain.

La bouche pleine, le noiraud affiche une moue de satisfaction. Prenant le temps terminer sa mastication, le Léodra se déplace jusqu'au pot pour en sentir plus précisement les effluves et mesurer la teneur en alcool.

" Vous chargez tout en épices ici ! Y a une raison particulière ? " demande le jeunot une fois que sa bouche est vide.

L'odorat fin du Shaloar ne se laisse pas tromper par la touche de miel et la forte teneur en épices, la boisson contient bien tout l'alcool qu'on peut espérer trouver dans du vin chaud.

A la remarque du jeune Léodra, la matrone s'esclaffe puis elle répond, amusée :

"Bah, c'est pas mieux ici qu'ailleurs, champion ! Quand on charge d'épices, c'est pour cacher l' goût du moisi et d' la piquette !"

Affichant un sourire carnassier amusé, le jeunot répond :

" Alors à la tienne ! "

Puis prendra une gorgée de ce vin chaud, savourant les effets que cela procure, puis tendra le pot à la serveuse pour qu'elle puisse en partager une gorgée si elle le souhaite.

" Dis moi, la vie semble avoir repris son cours normale, comme si Tradisgantia n'avait subit aucun assaut alors que la muraille n'est pas encore réparée. Y a t'il de grandes décisions qui ont été prises par les familles marchandes ou tout le monde se contente d'oublier ? "

A la proposition de Grage de boire dans le même pot après lui, la matrone a aussitôt une mine écoeurée qu'elle réprime rapidement tout en agitant rapidement la main en signe de dénégation :

"Sans façon ! Et on doit pas boire pendant l' service !"

A la question qui suit, la matrone reste un bon moment pensive puis répond en haussant les épaules :

"Bah, qu'est-ce qu'y pourraient prend' comme grand' décisions, les marchands ? C'était une invasion des morts et des démons, nan ? Comment qu'on peut prévoir ça ? Et comment qu'on peut l'empêcher ? Y parait qu' la foule a lynché ou lapidé que'ques sorciers et sorcières après ça ! C'est pas plus mal..."

" des sorciers, lapidés... "

Le jeunot ne peut s’empêcher de pouffer de rire félin

" Si c'était le cas, tu en parlerais autrement. Les sorciers de titre sont capable de faire des génocide en peu de temps. La chose n'aurait pas été sans conséquences."

Le noiraud reprend un bout de petit bout de viande qu'il mastique énergiquement en observant les réactions de la serveuse.

" Tu as vue ou entendu parler d'étrangers qui sont venus en ville depuis. Du genre encore jamais vu par ici. "

Sans se démonter, la matrone répond avec une moue méprisante :

"Un sorcier assommé, ça fait moins bien sa foutue sorcell'rie !"

Puis elle réfléchit à nouveau un instant avant de répondre, enjouée :

"Bah... on voit d' tout à Tradisgantia ! Y a tout l' temps des étrangers. Mais tu d'vrais l' savoir, quand même ! T'as été dans la Garde !"

Elle se met à rire bruyamment. Pour s'arrêter subitement :

"Mais t'as p't-êt' une idée derrière la tête ? C'est quel genre précis d'étrangers qu' tu cherches ?"

Un sourire de satisfaction amusée s'affiche à le remarque sur les sorciers assommés, tout en continuant et de manger, et d'écouter. Les dernières puissantes et longues mastications du prédateur laisse planer un petit silence avant que la voix grondante de l'homme félin se fasse entendre :

" Non... personne en particulier... Juste de nouvelles têtes qui viendraient de loin pour venir faire je ne sais quoi. Du genre jamais vu auparavant et bonjour j'arrive après la bataille pour voir, pour fouiner... "

Laissant cours un instant de réflexion, le Léodra reprend :

" Vois tu, y a ceux qui se battent pour l'argent, la gloire, ou quand ils n'ont pas le choix; et y ceux pour qui le combat à un sens. C'est pour ça que je m’intéresse à ce qui se passe à Trandisgantia quand j'y passe. "

Avec un sourire victorieux, la matrone agite le doigt tout en annonçant :

"Qui vient de loin ? Il y a bien des gens qui sont arrivés en ville y a plus d'une s'maine ! Un convoi du Karnazad a réussi à traverser les terres des Amazones ! Y avait des beaux guerriers avec des rubans ! Y z'ont fait rire dans les rues au début. Mais ça s'est vite changé en pleurs d' sang !

C' qu'est dommage, c'est qu'ils sont pas allés s' battre dans les Arènes. Et y sont pas restés longtemps en ville. Que'ques jours tout au plus ! L' convoi s'est séparé en plusieurs groupes, à c' qu'on dit ! Certains sont encore en ville."

Puis elle se met les poings sur les hanches, avec une mine souriante et assurée :

"Et toi, champion ? Qu'est-ce t'as à raconter d' tes voyages ?"

" Parce que " slurp's " Les récits d'un guerrier errant " crunch " t'intéresse " Glurp's...

Avalant sa bouchée, le noiraud reprend.

" Je me promène du nord au centre ces deniers temps. Ces guerriers du Kamazad comme tu dis, je les ai croisé tout au nord. Au fort de la corne brisée je crois. A ce qui se dit, le seigneur, Gagorath le cruel, a eu la mauvaise idée de s'attaquer à un convoi de fort braise. Du coup, au dernière nouvelle, y a plus de seigneur la-bas, ou il y en a un nouveau que je ne connais pas. "

Le Léodra fixe la matrone quelques instants afin d'en jauger les réactions avant de reprendre.

"Sur ce, soit mes informations sont erronées, sois sa fait longtemps que tu es sortie de ton service épicé. Le champion actuel de l'arène, c'est un des leur. Non ? Un rondelet tout en armure, ca te parle ? "

La matrone garde ses mains sur les hanches avec une mine dédaigneuse.

"Qu'y soit guerrier ou mendiant, on s'intéress' t'jours aux récits d'un voyageur qu' a survécu. Tu d'vrais savoir ça, champion."

Puis elle un sourire satisfait.

"Et bah ! Il aura pas t'nu bien longtemps, c' Gagorath le Cruel ! Fallait s'en douter, la peur et la bouch'rie, ça marche qu'un temps pour diriger. Vaut mieux avoir d' quoi appâter l' bon peuple !"

Enfin son ton se fait rigolard.

"On dirait qu' tu mélanges tout, champion ! T'as les dents bien affutées, mais pas trop la cervelle !

L' nouveau champion d' l' arène, en c' moment, c'est un grand Vraghâr avec une énorme masse de gel ! Et avant lui, c'était un S'mi-Géant tout en armure. Alors, oui, il était arrivé avec l' convoi du Karnazad, mais lui, il a pas d' rubans ! Rien à voir !"

Le shaloar prend plaisir à converser avec la matrone, surtout à l'écouter l'observer dans ses manières. Cela se traduit par un sourire carnassier. Pendant qu'il écoute, Grage alterne viande et abats qu'il mâche puissamment.

" Tiens donc... le rondelet sans ruban s'est fait détrône par un Vraghâr... " Crunch... Slurp's... Doit être frileux sous son armure...

L'expression de l'homme lion se veut amusé.

" Et ce Vraghâr, on sais pourquoi il est venu se perdre ici ? "

La matrone hausse les épaules et répond d'un ton vulgaire qui se veut philosophe :

"C'ui qui va à la chass' perd sa place !"

Puis elle se tient le double-menton, pensive :

"Tiens, d'ailleurs, on l'a pas revu, l' semi-géant en armure... il a quitté la ville avant l'arrivée du Vraghâr. J'ai pas ret'nu son nom, à lui non plus. Mais j' peux m' renseigner si ça t'intéress' vraiment ?

C' qu'y veut, l' Vraghâr ? Bah ! Sans doute comm' tous ceux qui risquent leur vie dans les Arènes : la gloire et la thune !"

Et elle s'esclaffe en se tenant les côtes.

" Notre semi géant a déguerpi pour chercher ses chaussettes de laine. Il y a combien de temps ? et ils sont toujours en ville les autres du Karnazad ? "

répond le massif Shaloar toujours en train de mastiquer.

La matrone serre les poings et les replace sur ses hanches, avec une mine faussement contrariée :

"J' vais finir par croire qu'y a pas qu' la cervelle qui débloque chez toi, champion. Les oreilles, c'est pas mieux. Ou alors, c'est la mémoire... donc toujours la cervelle ! Enfin.. j' crois..."

Et elle s'esclaffe à nouveau. A la fin de son explosion de rire, elle reprend, plus sérieuse :

"J' t'ai d'jà dit qu'y en avait qui étaient restés en ville. T'écoutes ou bien ?"

" Mouais..."

Réponds le Léodra mastiquant sa barbaque.

" Mais en arrivant aujourd'hui, un garde m'a annoncé que le champion de l'arène, c'était le gros en armure. Et toi, maintenant, tu m'annonces que c'est un Vraghâr. Alors, dans ma cervelle de guerrier pas très affutée, ça coince."

Se léchant le bout des doigts, le noiraud reprends.

" Et ils sont si nombreux que ça les sabreurs ? "

La matrone hausse les épaules et répond comme s'il s'agissait d'une évidence :

"Bah... ça veut juste dire qu' ton garde des portes n'est pas v'nu aux arènes d'puis plus d'une s'maine. C'est l' problème des rumeurs. Elles ont tendance à s' croiser et souvent pas dans l' bon ordre..."

Et à la dernière question du jeune Shaloar, elle répond du tac au tac par une autre question :

"Avec ou sans rubans, tes sabreurs ?"

Le gros minou lache un rire franc à la tirade de la serveuse. Après quoi, le jeunot reprend plus sérieusement.

" Le ruban possède une signification ? "