Et, à nouveau, le jeune Léodra se jette dans la tourmente.

La Léodrani fauve sourit, amusée, puis répond de sa voix calme :

"C'est ce que m'a appris ma mère. En temps normal, chaque Shaloar se voit enseigner nos traditions par sa mère. Et nos traditions commencent par l'enseignement de Shalaam'Crâgg."

Le jeune reste souriant et ouvert à la discussion.

" Cela sous entend qu'il n'y a pas de Déviante, ou de Réprouvés chez les Shaloaranis. Bien.. Ton enseignement peut continuer. "

C'est avec des oreilles bien dressées que la suite est attendue.

Charina hoche la tête, souriante, et poursuit :

"En effet.

Il existe par contre un petit nombre de Solitaires. Des Léodranis sans cour, soit parce qu'elles en ont été chassées, soit parce que leur mâle est décédé et qu'elles n'ont pas souhaité rejoindre une autre cour, soit parce qu'elles n'en ont jamais rejointe.

Plus courantes sont les Quêtrices. Des Léodranis sans cour, généralement parce qu'elles sont de jeunes adultes, qui partent ensemble à la recherche d'un mâle prometteur pour rejoindre sa cour. C'est ce que nous étions, Sadriska et moi, avant que tu nous acceptes."

Silencieux, le massif coiffés reste dans ses pensées quelques instants avant de répondre.

" D'ou vient ce désir si fort de chercher un mâle pour appartenir à une cours ? Vous étés capable de vous débrouiller seules et sans mâle ! Peut être mieux sans qu'avec d'ailleurs...

Ou étais-ce par souhait de prendre l'initiative avant de subir le désir impérieux d'un Léodra ? "

La réponse à ces interrogations est importante pour le jeunot.

Les deux Léodranis se figent dans leurs mouvements, fixant le jeune mâle, d'un air interdit. Ensuite, elles le fixent en penchant légèrement la tête de côté, la mine inquisitrice, recherchant manifestement un indice de moquerie. Cela ne dure que quelques courts instants, avant qu'elles reprennent le peignage et brossage.

Charina, tout en continuant l'usage du peigne, répond d'un ton placide et détaché :

"Bien entendu... et les Léodranis vont attendre que le vent daigne leur donner une descendance.

Et le désir impérieux d'un Léodra qui se passerait de l'accord d'une compagne est puni d'une sentence de mort."

Le jeune est intérieurement satisfait de la réponse qu'il vient d'entendre, surtout la fin. A nouveau, les mains de son excellence velue vont flatter avec délicatesse une des cuisses de chaque Léodranis. Silencieux, l'apprenant conserve le silence et laisse sa Favorite reprendre l'initiative de son enseignement.

Peu de temps ensuite, la jeune Léodra recommence à ronronner tout en brossant lentement et soigneusement son mâle.

Charina reprend donc son explication verbale sur les bonnes manières et les arcanes de comportement.

Le jeune se montre attentif, tout du moins, du mieux qu'il le peut. Par moment, il est évident que l'apprenant lutte contre la fatigue et cherche à se montrer assidu. Cette lutte devient de plus en plus compliquée car Grage est bercé par les mouvement de ses coiffeuses et les paroles qu'il entend.

Cependant, l'effort d'attention reste prononcé jusqu'à la fin des enseignements de la soirée.

Episodiquement, la tempête se fait entendre rageusement depuis l'extérieur, permettant ainsi au jeune Léodra de ne pas céder à la fatigue lorsque la lassitude commence à germer.

Charina essaie de rendre ses explications intéressante en décrivant en exemple des scènes concrètes de la vie des Shaloars pour illustrer ses notions de bonne conduite. Sadriska ne fait qu'entendre de longues périodes de faible ronronnement, interrompues lorsqu'elle change de position pour pouvoir mieux brosser différentes parties du corps de son mâle, mais qui reprennent sitôt qu'une position confortable pour elle-même est trouvée.

Après une longue séance d'apprentissage, Charina déclare :

"Nous allons devoir nous charger du souper."

Le jeune aquiesce par un leger mouvement de tête dignement reconnaissant et positif. Ensuite, c'est contre la paroie de l'habitat que le massif coiffé va s'installer avec une peau pour se couvrir. Restant attentif du mieux qu'il le peut, la suite est attendue. Les soubresauts d'attention montre bien que le guerrier lutte contre la fatigue. Mais le mâle tient à faire honneur au rituel du repas.

Le brouhaha et les fracas assourdis de la tempête se font entendre par à-coups pendant le reste de la journée et pendant les deux jours suivants. Ce n'est qu'en cours d'après-midi du surlendemain que les éléments s'apaisent et que le silence revient.

Prenant conscience de la durée du déchainement des éléments, le jeune s'occupe par le repos, la discussion, la méditation et les jeux (chamaillerie surtout avec sadriska).

Le Léodra met en application ce qu'il a appris et prend soin de parître empli de bonnes manières, même si il est évident que ce comportement n'est pas encore naturel.

Dès l'arrivée du calme après la tempète, la panoplie est enfilée, la grille est ouverte et le décor est observé. Dans l'éventualité, si certains villageois sont dans le besoin de bras pour une assistance, le guerrier spirituel s'y pretera volontier en restant à l'extérieur histoire de guetter l'éventuelle venue d'un membre du Conseil Volcanique.

Sadriska se prête aisément aux chamailleries, même si elle se détache parfois boudeuse quand elle est totalement dominée. Mais son éloignement dure une à deux heures au plus. Elle revient ensuite avec une attitude désolée et cherche à se faire pardonner.

Quand la grille est retirée, Grage peut voir les habitants des demeures du Marché Extérieur commencer à sortir et contempler les quelques dégâts provoqués par la tempête. Le jeune Léodra observe ensuite les préparatifs de déménagement de l'ensemble des habitants, qui se pressent de s'organiser pour aller à l'abri au sein du volcan. Et, en moins d'une heure, le Marché Extérieur s'est vidé... il ne reste plus que les gardes à la palissade.