En fin de matinée, Grage revient dans le Quartier des Arènes.

Ne pouvant rien faire, le jeune homme lion reste tel quel, tel un félin au repos les sens à l'affût .

Le temps passe...

Subitement, Grage entend des pas aller de la table proche à la porte. Sans passer près de lui. La porte est ouverte comme peut en témoigner un léger souffle de vent. Et le massif Shaloar vautré au sol peut entendre la voix du mutant clamer :

"Holà ! Les gardes ! Ram'nez-vous ! J'ai un cas d'usur... d'usru... enfin de vol d'identité et d'essai d'agression !"

Surpris dans son repos vigilant, l'allongé au sol entend que le mutant hèle ce qui semble être des gardes. Entend que son ennemi est occupé, le shaloar essaye de bouger.

S'il l'usage de son corps est retrouvé, Grage se lève.

Sinon... il attend de pouvoir bouger. Tant qu'il est allongé, seul un capitaine de garde pourra s'approcher du sauveur. Sinon, par défense, le dragon sera appelé.

Hélas, le corps de Grage ne répond toujours pas à sa volonté.

Une voix masculine inconnue répond au mutant : "Tiens ? Yorglos l'Intouchable ! Qu'est ce qu'y t'arrive ?"

Le mutant reprend, rigolard : "Un p'tit malin qui a pris l'apparence du Sauveur d' la Cité. Mais il a posé des tas d' questions digne d'un nouvel arrivant. Il a même confondu les Tékélitt et les Sarzano..."

Amusée, la voix masculine rétorque : "Haha ! Mais y faudrait que l' vrai Grage Niark s' plaigne de l'usurpation pour qu'on ait un motif d'inculpation..."

Le mutant grommelle et ajoute à voix énervée : "Et l' fait qu'il ait voulu m'agresser en m' balançant une chope, ça compte ? Pouvez d'mander au patron !"

Après un bref silence, la voix masculine répond : "Mouaiiiis... si y a des témoins qui confirment..."

Le sauveur reste allongé, à l'écoute des propos, toujours avec le même état d'esprit. Seul un capitaine de garde, connu de l'ex lieutenant de préférence, pourra toucher le sauveur. Sinon, par défense, le dragon sera appelé.

Le jeune Léodra entend ensuite des pas s'approcher et s'arrêter à environ deux-trois mètres. Un groupe de quatre personnes.

Une nouvelle voix masculine inconnue s'écrie : "Y a pas à dire ! L'est r'ssemblant !"
Quelques rires y répondent.

La première voix de garde ayant répondu au mutant clame ensuite à la cantonnade :

"Hola ! Qu' ceux qui confirment que c't olibrius à l'aspect du Sauveur a voulu balancer une chope à la gueule de c' mutant lèvent la main !"

Un silence s'installe quelques instants.

Quelqu'un soupire. Sans doute la même personne qui prend ensuite la parole, le même garde :

"Ok. On va l'alpaguer et l' mett' au frais..."

La même seconde voix inconnue s'exclame à voix basse :

"Dommage que c' soit pas c't empaffé de Léodra. Ça m'aurait fait plaisir de l' foutre au trou..."

Le massif allongé toujours immobile ne peut que subir la situation.

La garde étant la, le shaloar est un peu plus confiant. La situation pourrait même devenir plaisante si le sauveur devait être porté par les hommes de la garde.

Quoi qu'il en soit, le guerrier spirituel mémorise la seconde voix inconnue.

Peu de temps après, deux hommes se placent autour du corps affaissé du jeune Léodra et le soulève avec peine. Un troisième homme est appelé par celui qui a le plus tenu le crachoir. Le temps qu'il arrive, le Shaloar sent qu'il est défait de ses armes. Et ce troisième homme vient placer Grage sur son dos alors que le Shaloar est toujours soutenu par les deux premiers hommes. Nombre d'interjections grossières et de commentaires scabreux sur l'aisance de l'appétit du porté sont grommelés à voix basse pendant l'opération, par les trois gardes en plein ouvrage.

Et cet étrange équipage commence à se déplacer, quittant la taverne. Le groupe de soldats est au nombre de six. Ce qui fait deux hommes libres de leurs mains, dont celui qui a le plus parlé. Et un transporteur d'armes. Porté, Grage se sent toujours un véritable poids mort. Seulement capable de respirer instinctivement.

Ce n'est que deux rues plus loin qu'il sent enfin ses muscles reprendre de leur tonicité.

Au début, le shaloar trouve la situation un peu humiliante. Mais ensuite, baloté par les gardes, le massif shaloar est un peu amusé par la situation.

Pendant le trajet, Grage a tenté de localiser celui qui qui veut le mettre en geole.

Quand le transporté retrouve ses moyens, il reste un poids mort pendant encore quelques temps. Mais l'ex lieutenant n'est pas dupe et pense que le lieutenant du groupe, celui qui connait Yorglos l'Intouchable doit aussi connaitre les capacités du mutant et leur limite. Au bout de quatre rue, le sauveur se redresse. Sachant que les gardes ne sont pas des hommes à rire quand ils sont dans les rues, les gestes sont pacifique et l'initiative de la parole est laissée.

En observant les gardes qui le transportent, Grage réalise que le chef de groupe n'est qu'un sergent.

Quand le Shaloar commence à se redresser, les deux gardes porteurs autour de lui essaient de le maintenir courbé tandis que celui qui le portait sur son dos se dégage prestement, portant la main sur son épée. Les deux gardes qui le maintiennent grognent en même temps :

"Halte-là, imitateur !"
"Halte-là, fripouille !"

Dans le même temps, le sergent et le dernier soldat aux mains libres ont également dégainé. A l'arrière du prisonnier, le garde porteur des armes du Léodra se recule.

Le Léodra ne force pas pour le moment, restant tel que les gardes le souhaite. Le grondement du sauveur se fait entendre :

" Hé les gars. On s'calme. Voyez pas qu'Yorglos vous a fait une blague. Vous connaissez beaucoup d'imitateur qui pèse aussi lourd que moi.

Il m'a incapacité avec un de ses pouvoirs. C'est tout. "

Les gardes toisent le Léodra noir avec une mine méfiante. Et celui de gauche qui le retient s'exclame :

"Hé ! Yorglos a eu des problèmes avec un imitateur, lui aussi. C'était un détrousseur des ruelles qui usait de son apparence pour filer la trouille à ses victimes !"

Celui de droite ajoute aussitôt :

"Ah ouais ! J' 'n ai entendu causer ! Yorglos a dégusté p'dant un interrogatoire. Mais c' 'tait pas lui l' coupab' !"

Le troisième garde qui portait peu avant le Shaloar - manifestement le plus massif et costaud - le pointe de son épée, la mine revêche :

"Joue pas au p'tit malin, toi ! Tu nous niqueras pas avec ton apparence de sorcellerie !"

Le Léodra reste pacifique dans son attitude, avec un grondement assuré qui reprend :

" Mouais... Belle histoire...   "

Et après un petit silence,

" Aussi vrai qu'j'ai apporté la tête de Jodrak le Cruel et de sa brute en compagnie du capitaine, j'suis Grage Niark, ex lieutenant et sauveur d'la cité.

Enfin moi, j'dis ça, c'est pour vous évitez une rature de Kentarrak le Roux. "

L'épée à la main, le sergent intervient alors :

"Si t' es vraiment Grage Niark, tu dois savoir sur qui t' as renversé ton r'pas après avoir été bousculé dans l' dos par Klaarsch Griffes Sanglantes à la cantine ?"

Le jeune Léodra se souvient aussitôt du vieux Skraka au museau couvert de cicatrices, lieutenant de la Garde.

Jet de Mémoire + sagesse populaire + Esprit Méthodique + 1d20 : 8 - 5 + 0 + 9 = 12

Mais il a beau chercher dans ses souvenirs, Grage ne retrouve pas d'épisode de sa vie de lieutenant où il aurait été bousculé par le vieux Skraka silencieux et avisé. Par contre, à force de se creuser la tête, il se remémore une scène de repas de midi où le jeune Trash'arsk le Déchiqueteur, petit-fils de Klaarsch, également lieutenant, lui avait fait renverser son repas sur Ilmanariiis qui mangeait en face de lui. Le dénommé Ilmanariiis est un Kosruuzi discret et armé de six katanas portés dans le dos. Le début de scène de combat avait été interrompu par l'arrivée de Kentarrak sur les lieux et les deux jeunes Shaloars avaient fait un jour de trou.

Le shaloar conserve son attitude pacifique, fouillant dans les limbes de son esprit. Ne pouvant répondre à la question, le gondement s'improvise sur le ton de l'étonnement amical :

" Non...!?!  Ce Skraka au museau truffé de cicatrices a réussi à m'bousculer ?!?  Tu m'charries la.. ???

Tu m'aurais dit Trash'ars le Déchiqueteur, avec un plateau qui attéri sur Ilmanariiis le Kosruuzi, j't'aurai dit oui. Une histoire qui s'termine au gniouf, ca s'oublie pas.

Mais la, Klaarsch... Ca m'dit rien. "

Et l'homme lion guette les réactions

"Ok, t'es bien Grage Niark", indique placidement le sergent. "Laissez-le aller..."

Le garde à gauche du jeune Léodra s'écrie à voix basse : "Oh... merde..."
Grage peut aisément reconnaître la voix du second intervenant lors de l'arrivée des gardes.

Et le massif Shaloar est lentement relâché par les deux soldats qui l'entourent. Le gaillard qui le menaçait range son épée avec une mine mélangeant indécision et méfiance.

"Rend lui ses armes !", ordonne brièvement le sergent au porteur s'étant reculé à distance.

L'ex lieutenant laisse le temps aux gardes de prendre connaissance des ordres, se redresse quand il est libre de mouvement, prend ses armes quand elles lui sont tendues et s'en équipe tout en grondant avec sincérité :

" Merci les gars.

Dites, ce mutant, i fait souvent du zèle comme ça ? Jamais eu à faire à c'genre de pouvoir. Pourtant, j'en tranche du démon."

Pendant qu'il s'équipe, le Léodra continu d'observer les réactions.

"C'est pas courant, mais ça lui arrive", répond tranquillement le sergent en surveillant Grage qui récupère ses armes.

"Ouais, l'a du mal prend' son interrogatoire !", commente d'un ton amusé le garde armé et non affecté au transport du prisonnier, légèrement en retrait.

Les quatre autres gardes sont plus circonspects, soit en pleine interrogation, soit méfiants.

Terminant l'ajustement de son équipement dans des gestes lents et mesurables pour les hommes d'armes, le Shaloar est maintenant plus attentif à son environnement qu'aux hommes d'armes qui l'entourent.

" Sinon, tout s'passe comme vous voulez ? "

La question est posée sans véritablement attendre de réponse explicite, le jeune prédateur sachant pertinemment qu'il n'est plus membre de la garde.

"Ouais, on va profiter du calme", répond tranquillement le sergent, conservant sa mine sérieuse tout en fixant le massif Shaloar.

"Alors évit' de t'attirer d' nouveaux problèmes..."

Et il se détourne en faisant un geste d'invitation de la main vers ses hommes : "On y va.". Et il commence à s'éloigner.

Sans mot dire, les cinq gardes lui emboitent le pas, surveillant le jeune Léodra tout en s'écartant pour ne pas passer trop près de lui.

Le sauveur adresse un salut martial de la tête aux hommes de la garde qui s'en vont. Ensuite, la direction du quartier des indépendants est prise en mode pas rapide et assuré.

Vigilant pendant son trajet, l'ex lieutenant tente d'apprécier l'heure qu'il est.

Marchant le long des rues, Grage ne trouve pas l'Œil du Gardien au-dessus de lui. Cela semble signifier que l'heure est déjà bien avancée dans la journée.

Le massif Shaloar rejoint bientôt l'avenue qui longe le fleuve. Et en la suivant, il progresse jusque dans le quartier des indépendants.

Suite dans le quartier des indépendants