Dès qu'il commence à sprinter,

Le solitaire fronce les sourcils accompagné d'une moue moue interrogative lui aussi.

" Je comprends pas ta remarque. J'ai payé pour la chambre. Que je sois seul ou avec dix femelles; la chambre reste la même.

J'ai payé pour la chambre. "

Insiste le sauveur qui visiblement ne saisi pas la différence.

Jérémiah fait alors un instant les gros yeux sceptiques en fixant Grage. Puis il se décide à parler.

"Est-ce bien ce que le personnel t'a annoncé quand tu as pris la chambre ? Que tu pouvais y faire entrer dix femelles gratuitement ?"

Le sourire du sauveur s'élargie, un peu, beaucoup, puis, dans un pouf de rire finit par répondre :

" Fais pas ta Mashrani ! T'es pas assez velu pour ça. "

Le ton est amicalement taquin et non moqueur, annoncé à la façon d'une boutade entre potes. La reprise se fait plus sérieuse :

" J'ai toujours demandé une chambre, elles ne m'ont rien précisées.

Et pour ce soir, la mashrani à l'accueil ne m'a rien dit alors que nous étions deux. Pourtant, elle sait bien que la connaissance des manières d'usages me font défaut. "

Jérémiah soupire. Puis il ajoute :

"Elle a bien vu que j'avais une amphore. Et il est coutume courante qu'un nanti disposant d'une grande chambre invite des amis pour y festoyer ensemble. L'hôtel espère que des commandes supplémentaires seront faites, histoire d'augmenter ses gains.

Et tu n'es pas ici dans une gargote. Autrement dit, le personnel n'enquiquine pas ses clients avec du bavardage inutile.

C'est à toi de poser les questions si tu ignores les réponses. Et pas au personnel de t'insulter en te donnant des précisions que tu connaissais déjà."

Et il appuie ses dernières paroles d'un regard prononcé, avant de reprendre le sourire.

"Et d'ailleurs, comment sais-tu qu'elle sait bien que la connaissance des manières d'usages te font défaut ? Il me semble que tu ne t'es pas encore fait jeter dehors pour goujaterie..."

" D’où elles me viendraient à l'esprit ces questions ? Je paie une chambre, c'est temporairement ma tanière. C'est tout. D’où tu veux que je me pose des questions. Hein ? "

Sans perdre un instant pour répondre d'un ton vif et direct, la dernière question est appuyée d'une levée de menton en réponse au regard prononcé de son interlocuteur, avec l'expression de l'évidente évidence.

" Et  quand on ne connait pas les précisions, ce n'est pas insultant que de se faire instruire. Quand on sais pas, bah, on sais pas. Mais j'ai bien l'intention de les poser ces questions que je ne connais pas. Je ne vois pas trop comment, mais chaque déconvenue m'instruit. "

Le shaloar se lève subitement.

" Bon, elle vient cette bouffe. J'ai faim moi. "

L'impatient va à la porte et, sans l'ouvrir écoute. si aucun bruit n'est perceptible, alors la suite s’enchaîne naturellement, à ton normal et de façon théâtralisée et sincère.

" J'étais la, dans un baquet en train de me laver. - L'endroit du baquet est désigné du doigt -

Elle est rentrée, elle m'a proposé assistance. J'ai accepté et, pour lui faciliter le travail, je me suis levé en écartant bras et jambes. C'est plus pratique non ? Comme ça.  - la position est prise devant le maître des routes sans aucun complexe -

Et la, Mashrani fait sa choquée comme si elle avait jamais vu un mâle, et patati, et patata.

Mince, je lui fais l'honneur de me montrer à elle, surtout que je suis quand même un beau morceau, et elle me balance un mépris enrobé de fausses manières. Tu te rends compte ?!

C'est comme ça que j'ai agis et pensé sur l'instant... "

L'homme lion a le regard bas, avec une certaine tension suite à cet aveu.

Jérémiah ne peut s'empêcher d'avoir un mouvement de recul accompagné d'un visage exprimant un mélange de surprise et d'horreur. Il souffle ensuite et cherche un peu ses mots avant de parler.

"Hem...

Je commence à comprendre...

Tout d'abord, tu ne dois avoir que l'âge d'un jeune adulte à peine sorti de l'enfance. Alors que les personnes avec qui tu communiques - moi y compris - te prennent pour un adulte fait. Cela est sans doute du au fait que tu parviens à t'exprimer avec aisance. Tes actes déplacés dû à ton jeune âge sont alors d'autant plus choquants pour les citadins. Qui ne savent dès lors plus sur quel pied danser en ta présence.

Ce qui explique sans doute tes meilleures expériences au sein de milieux peu éduqués."

Avant de poursuivre, le Maitre des Routes vérifie les réactions du jeune Léodra à ses quelques mots.

Les réactions premières laissent l'homme lion dubitatif, avant d'être à l'écoute de ce qui se dit à son sujet. Puis, sérieusement interrogatif, le lionceau reprend

" Et ??? C'est pas la première fois que je te le dis, à toi. Et à toi seulement. Aurais-je tord de t'faire confiance sur ce sujet que je devrais taire ? "

Et avant que le maître des routes ne puisse s'exprimer, le massif guerrier poursuit avec une sincère fierté :

" Sache que mes maîtres me confient des missions depuis plus de - comptage sur les doigts - deux saisons. Je les accompli dans l'autonomie et sans perte d'hommes. Je fais mes comptes rendus qui s'améliorent à chaque fois. Recherche, enquête, bataille....

Je te fais l'aveu d'avoir connu le véritable échec. La ou il me sera impossible de recommencer avant d'être plus fort. Beaucoup plus fort et certainement avec le regard des dieux maintenant. "

Le Léodra fait signe de silence en mettant un doigt sur sa bouche, puis écoute à la porte. Si rien n'est entendu, alors le discours est repris et les premiers mots sont chuchoté à proximité de l'oreille de l'humain.

" C'est la cité Triatyss dont je t'ai déjà parlé. "

Puis, a timbre normal

" rend toi compte qu'à çà !  "

Le narrateur montre un très faible espace de vide entre le pouce et l'index de sa main droite, les dents serrés, la rage aux lèvres.

" Jamais un étranger ne les avait approché d'aussi prêt sans être remarqué, intercepté ou autre.. A ça prêt, je les tannais tous ! Et c'est pas une métaphore. Pffff.... "

Puis la mauvaiseté s'efface  au profil d'une expression plus douce, un peu ironiquement amusé

" Si je pouvais avoir autant de succès avec les shaloarani, je m'en porterais mieux. "

Et à nouveaux, le jeune démasqué à le regard bas.

Jérémiah hoche la tête approbativement. Puis il sourit. Et il finit par déclarer, conservant son sourire :

"En tout cas, tu m'as sorti d'une impasse.

Et je me dois de te faire confiance pour le prochain mois... en te confiant le sort de Kajira.
Il est manifeste que tes supérieurs te font également confiance malgré ton jeune âge. Aussi je pense que je ne place pas mes espoirs de façon indue.

Si tu souhaites recevoir mon avis ou mon conseil, je suis à ta disposition. Mais je ne suis pas certain de réussir à bien comprendre toutes tes paroles. Par avance, je te prie de m'en excuser."

Et subitement, des frappes discrètes retentissent sur la porte de la chambre. Le jeune Shaloar peut constater que sans l'aide de ses pouvoirs totémiques la chambre semble bien insonorisée...

Avant de répondre au bruits de la porte, le jeune Léodra adresse un regard qui atteste d'une sincère reconnaissance au regard de la confiance exprimée. Après ce bref instant, le shaloar se rapproche de son épée légendaire en faisant face à l'entrée avant de gronder avec aplomb

" C'est ouvert. "

Puis, curieux et avec les papilles qui salivent, l'homme lion se fait observateur.

Aussitôt, la porte s'ouvre sur deux jeunes Mashras déjà vus par Grage. Un enfant mâle et une enfant femelle, portant tous deux un plateau contenant chacun une assiette garnie d'une cloche en métal, ainsi qu'une coupe vide, un cruchon, une miche de pain et une assiette de baies de formes et de couleurs variées.

Ils entrent et s'arrêtent après quelques pas à l'intérieur de la chambre.

"Où désirez-vous que nous déposions vos plateaux, messires ?", demande la jeune Mashrani.

Se faire livrer et manger dans sa chambre est une nouvelle et savoureuse expérience qui arrive à petits pas feutrés. C'est avec une véritable expression de satisfaction que le shaloar désigne un lieu, au sol, pour que le plateau y soit posé.

" Ici. Merci à vous. "

Curieux de s'avoir ce que la femme panthère lui a fait préparer, la queue de l'homme lion dodeline lentement.

Les deux jeunes Mashras viennent déposer cérémonieusement leur plateau à l'endroit indiqué par Grage. Puis ils se redressent, s'inclinent lentement vers les deux hommes puis s'éloignent à pas rapides et furtifs. Ils sortent de la chambre et referment la porte derrière eux.

Jérémiah soupire d'aise et laisse les opportunités au détenteur de la chambre.

Le shaloar attend que le deux bambins soient partis, se dirige vers son sac pour en tirer de vieux linge qui serviront de serviette anti tache, avant d'aller s'asseoir de façon à avoir une cloche sur sa gauche et une cloche sur sa droite.

Jérémiah peut clairement sentir qu'il n'est plus la source d’intérêt principal.Le shaloar se demande ce qu'il y a sous les cloches et trouve que cela donne une effet surprise aux plats.

" T'a vu, ils sont joueurs ici. Ils nous présentent nos plats comme des cadeaux. Hummmm   Dis rien, faut que je trouve du premier coup lequel est le mien. "

La Léodra passe ses paumes de main au dessus des cloches pour sentir la chaleur, puis sa truffe pour renifler les odeurs.

" Si j'trouve pas du premier coup, tu manges pas. "

Poursuis le jeune amusé par le jeu des cloches.

Grage constate alors que les deux plats exhalent la même odeur : celle du lapin rôti accompagné de pommes de terre en sauce.

Jérémiah se contente de hausser un sourcil faussement étonné par les mots prononcés.

Une moue de déception se dessine sur le visage du massif chercheur. C'est avec un peu d'amertume que le Léodra se désintéresse des plats sans soulever les cloches et retourne s’asseoir dos au mur, en tailleur, à l'endroit ou il était avec un grondement mi amer mi amusé

" Tout compte fait, tu vas manger pour deux.

Elle a le sens de l'humour, ou elle est revancharde, voir les deux. Je mangerais sur le route, après t'avoir raccompagné.

Bon appétit."

Après un sourire amical, le jeunot se prépare à regarder le maître des routes tout en poursuivant

" Quand tu réponds pas à un sujet, c'est qu'il te dérange.

Mais la, je vais m'répéter : Veux-tu que je reste quelques temps dans la cité pendant ta réapparition ! "

La formulation n'est plus une question et l'humain peut aisément comprendre que le jeune assis ne lâchera le sujet avant d'avoir sa réponse.

Jérémiah hausse à nouveau un sourcil. Puis il commente, philosophe :

"J'aurais bien assez de mon assiette.
Et tu as voulu faire ton nanti en ne choisissant pas. Tu n'as que ce que tu mérites si l'un des choix ne te convenait pas."

Ensuite, il fronce les sourcils et a une mine perplexe. Il hausse alors les épaules et ajoute :

"Toutes mes excuses si je ne t'ai pas répondu.

C'est sans doute parce que le sujet n'a aucune importance de mon point de vue. Tu as déjà résolu le problème qui me concernait. Les problèmes suivants toucheront sans doute toute la ville. Et tu n'y es pas encore mêlé. Ce n'est pas à moi de décider de la suite..."

" Nanti toit même ! "

Répond amicalement le shaloar

" C'est pas compliqué de savoir qu'un Léodra préfère les abats, des tripes bien fraîches, un foie saignant avec des yeux pour le croquant. C'est une mashrani bon sang !

entre les vieux qui s'droguent, et les jeunes bercés dans l'confort, ils en oublient leur vrai nature. Pffff Décadence je te dit.

Et je l'ai honoré de ma confiance pour qu'elle me remercie ainsi. Elle a gagné, je mangerais plus ici."

Puis, la curiosité remplace la bouguonerie passagère.

" C'est quoi les problèmes qui vont toucher toute la ville. De la baston ? Une guerre ? "

Avec un mince sourire en coin, Jérémiah rétorque :

"Et en supposant qu'elle connaisse les Léodras, es-tu bien certain que tu fais les mêmes choix que tous les Léodras ?"

Il hausse les épaules.

"Tu fais juste à nouveau preuve d'égoïsme en rejetant ta faute sur les autres."

Il marque alors un temps de silence, puis reprend :

"Je sens que de nouveaux problèmes vont surgir, sans même utiliser mon pouvoir. Le coup de la momie infiltrée n'est certainement pas un mouvement isolé. Je compte en discourir au sein des Maitres des Routes. Histoire de faire jouer la prévention et, espérons, une plus grande vigilance au sein des Grandes Maisons."

" Nan mais, tu t'entends la !?! Rejeter ma faute sur les autres... Pfff..

Rétorque le jeunot vivement

" Bon, tu viens manger ! Ça va refroidir. "

Sur ces paroles, le Leodra se rapproche à nouveau des plateaux et soulève les couvercles pour satisfaire sa curiosité autant que pour montrer qu'il assume ses actes.

" Si c'est pas un cas isolé, la momie, alors c'est toute la Citée qui est visée. Faut que le sauveur reste.

Tu accepterais de m'en dire plus après ta rencontre avec tes chefs ?

Et si tu as un plan pour se faire du besants en masse autre que l'arène, je suis preneur. Faut que j' puisse dormir en sécurité pendant que je reste. "

Jérémiah sourit légèrement lors de la provocation du jeune Shandar. Et il continue d'écouter attentivement. Il demande alors :

"Es-tu certain de vouloir te mêler des affaires des Grandes Familles ? De te mêler à des milieux huppés, où le savoir-vivre est plus important que les motivations ?

Car c'est là que vont se déplacer les confrontations.

Et si c'est ton choix, je peux te loger ou te récompenser financièrement pour ton assistance jusqu'à ce jour."

Le solitaire réponds du tac au tac, avec un sourire exagéré :

" j'ai pas le droit de me mêler des affaires des grandes familles.

Et si je reste ici, faut que j'aille chercher mes jambes."

La seconde phrase est dites avec un détachement amusé

Sous les couvercles, conformément aux senteurs, Grage trouve deux assiettes emplies de morceaux de lapin en sauce accompagnés de pommes de terres cuites.

"Des jambes ?", s'exclame Jérémiah, surpris.

Il se reprend vite et ajoute :

"Excuse-moi, mais je ne pense pas avoir compris ton annonce.

Et sans vouloir me montrer indiscret, qu'est-ce qui te retire le droit de te mêler des affaires des Grandes Familles ? Hormi la famille Sarzano, bien entendu..."