En ce début de nuit, Grage arrive devant l'Hostellerie du Havre Ronronnant.

Il n'a rencontré aucune encombre pendant son cheminement depuis presque la porte Est. A cette heure tardive, la rue de l'hôtel est vide. De la lumière filtre néanmoins entre les volets clos de l'établissement. Le jeune Léodra ressent toujours une impression de menace diffuse, comme à chaque fois qu'il se trouve dans les rues nocturnes de la grande cité.

Avant que l'hostellerie ne soit en vue, le massif marcheur prend le temps d'observer les va et vient. Mais, ne percevant âme qui vive en cet instant, c'est un grommellement d'insatisfaction ténu qui sort des entrailles de l'homme lion. Puis les sens et l'instinct du fauve sondent les alentours en quête d'un éventuel poursuivant.

Cela fait, et si rien n'est perçu, alors la direction de l'entrée d'havre ronronnant est prise d'un pas martial et assuré.

L'homme-lion ne repère aucune présence l'ayant pris en filature. Le Sens des Totems révèle à nouveau six guerriers spirituels du Fauve à l'intérieur de l'hostellerie.

L'ex champion balaye sa mauvaiseté d'un souffle, pour laisser place à son aplomb naturel.

De son pas décidée noiraud s'approche de la porte principale, frappe avec franchise de trois coups secs, puis patiente, prêt à se montrer si besoin.

L'ouverture du judas est presque immédiate. Deux gros yeux s'y encadrent. Une voix grave, aisément reconnaissable comme celle du Semi-Géant de garde, déclare dès que le jeune Léodra se montre :

"Ah, c'est toi. Que veux-tu ?"

Le noiraud regarde son interlocuteur avec aplomb le temps de sa réponse

" Une chambre pour la nuit "

Puis l'observation de l'environnement reprend le dessus.

La réponse ne se fait pas attendre :

"Prouve moi que tu en as les moyens !"

Grage ne repère toujours aucune présence dans les environs. Quelques flonflons festifs peuvent être entendus depuis une rue lointaine.

Sans rechigner, le noiraud se prête aux exigences du portier. Grage montre donc une de ses bourses contenant suffisamment pour une nuit de dodo. Le guerrier reste attentif pendant cette opération.

Grage va devoir montrer le contenu de sa bourse en l'ouvrant pour que le grand portier daigne ouvrir la porte. Le Semi-Géant en haubert de mailles reste derrière la large porte, dépassant sur le côté, la tête couverte par un casque à nasal et cimier. A sa ceinture pend toujours un énorme gourdin en bois pétrifié.  

De l'autre côté, le massif Shaloar pourra constater que le hall d'entrée sentant la lavande n'a pas changé : une arche à gauche munie d'un rideau de perles, un parquet recouvert de tapis épais, des murs recouverts de velours violet ou bordeaux, un escalier de bois droit et montant, orné d'un tapis bleu roi et bleu marine contre le mur à droite, un comptoir d'ébène laqué au fond.

Derrière le comptoir, la même Mashra noire adresse au jeune Léodra un sourire à la fois amusé et accueillant.

Le noiraud conserve conserve son paraître martial tant qu'il est à proximité du portier. Mais plus il s'approche de la Mashra, et plus son air sérieux disparaît au profit d'un sourire agréable et visiblement satisfait. Comme lors de sa première visite, le guerrier ne manque pas de savourer les charmes de l’hôtesse d'accueil; Cependant, le regard se fait moins insistant.

Une fois à proximité, le noiraud gronde son salut respectueusement les yeux plongés dans ceux de sa ravissante interlocutrice.

" Salut. "

En silence, la belle Mashra uniquement vêtue de voiles cette fois-ci mauves prend le temps d'observer le jeune Léodra de haut en bas. Elle répond avec détachement et le timbre grondant des Shaloars :

"Bonsoir. Il y a du mieux, Sauveur de la Cité."

Puis avec un sourire commercial :

"Venez vous pour un repos ou pour un repas ?"

" Hummm... Bonsoir"

grommelle le jeunot faisant visiblement un nouvel effort de bienséance, espérant convenir au bien parler du lieu.

" Avant de me reposer ou autres, j'aimerais entendre des nouvelles Yarm'narsh, si tu le connais, bien sur. Pelage Fauve. "

Avec tout autant de détachement, la belle noiraude répond :

"Je ne connais pas de Yarm'narsh. Et nos services ne comprennent pas le commerce d'informations.

Alors ? Souhaitez-vous le repos ou le repas ?"

" Commerce d'informations ?!? "

Sincèrement dubitatif avant de reprendre son sourire du charmant jeunot

" Parce que ça se vends des informations comme celle la ? Juste des nouvelles d'une connaissances ?... Ça vaut combien ? "

Conservant à la fois un sourire charmant et un regard blasé indiquant son peu d'intérêt pour la conversation en cours, la belle Mashra répond :

"Aucune idée...

Et si vous ne souhaitez ni repas ni repos, je ne peux que vous inviter à repasser par la porte."

Le noiraud regarde la belle noiraude avec une moue amusée avant de reprendre

" Il me semblait aussi.

La chambre du lion est disponible ? "

"La chambre du lion rugissant est libre, seigneur.

Cela vous coûtera la modique somme de 2 Couronnes pour une nuitée", répond la Mashra en conservant toute sa superbe imperturbable.

Le solitaire souriant attrape sa bourse, et la pose le tout sur le comptoir d'ébène laqué avec délicatesse. Ensuite, avec un sourire amusé, le noiraud retire son gantelet et place sa main droite sur le comptoir, doigts écartés, à droite du tas de pièces. Puis, il fait glisser un beusant à l’extrémité de chaque doigt, pour les balayer sur le coté droits. L’opération est répétée 4 fois avant de faire une pile avec les beusants mis de côté, et recommence l’opération pour former une autre pile. Tout est fait lentement, avec minutie et l’homme lion se montre délicat pour ne pas rayer le comptoir.

Le tout est fait avec une lenteur qui permet au Léodra de pouvoir savourer silencieusement la présence de la sublime Mashra qui lui fait face. Même si tout est fait pour le montrer le moins possible. La queue du mâle dodeline dans les airs durant l’exercice.

Avec une moue satisfaite et interrogative à la fois, le sauveur regarde la fauve avec un éclat brillant dans les yeux en silence.

Une fois que Grage a terminé ses piles, la ravissante Mashra se tourne pour tirer une fois sur un cordon. Puis elle encaisse les pièces avant de déposer délicatement une clé à tête de lion sur le comptoir. Pendant ce court délai, un jeune Mashra arrive en courant et ralentit de manière régulière pour faire les derniers pas en marchant.

Le noiraud range lentement son bardas, se montrant délicat pendant son opération. Puis il fixe la ravissante hôtesse tandis que son air de jeune séducteur laisse place à un aplomb plus mature.

" A défaut d'avoir de ses nouvelles, je peux au moins savoir si il est encore vivant ? Ça me déplairai fortement que quelqu'un ai nuit à sa personne. "

Et le Léodra patiente, attendant sa réponse. Le regard sérieux n'a, sur l'instant, plus rien d'admiratif.

La ravissante Mashra décerne alors le même regard blasé qu'une mère peut avoir envers son enfant un peu idiot.

"Vos oreilles vous ont-elles trahi, seigneur, quand je vous ai indiqué que je ne connaissais pas de Yam'narsh ?"

Dans le même temps, le jeune Mashra saisit délicatement la clé à tête de lion et la garde en main. Puis il patiente en silence.

Le sérieux du noiraud vacille légèrement face à la charmante courtoisie de la délicieuse mashra. Il faut juste le temps d'improviser une réponse avant que l'aplomb mature ne revienne envahir le jeunot qui ne perd pas le fil de son objectif malgré tout.

" Tu sais peut-être auprès de qui je peux me renseigner ? "

Le guerrier ne montre aucune volonté se saisir des clefs pour le moment.

Le regard de la belle tenancière se radoucit et elle répond tranquillement, avec courtoisie :

"Sans doute auprès des anciens du Clan Mashra, seigneur."

Elle ponctue sa phrase par une légère inclinaison de la tête et un regard baissé. Les quelques notions d'étiquette que possèdent Grage indique au puissant Léodra que la conversation est terminée. Il peut bien sûr la poursuivre s'il tient à passer pour un rustre.

Le noiraud allait pour enchaîner ses propos, mais l'inclinaison de tête lui laisse la bouche légèrement entrouverte quelques brèves secondes. Le shaloar ne masque pas un embarras visuel mais reste silencieux.

Puis l'embarras disparaît au profil d'un regard amical et respectueux.

" un réveil avant l'aube, c'est possible ?"

"Bien entendu, seigneur", répond la serviable Mashra sans rien perdre de sa superbe.

"A quelle heure souhaitez vous être réveillé ?"

Le jeune Mashra continue à attendre, immobile et silencieux, la clé à la main.