Grage arrive en fin d'après-midi...

... au sein du quartier des indépendant, en marchant le long du fleuve. Pendant son périple, il n'a croisé que deux ou trois passants à la démarche pressée, qui sont passés le plus loin possible de lui.

Un peu partout, il peut contempler les gouttes d'eau qui chutent des toits et les petits ruisselets qui sillonnent les rues. Comme là d'où il vient, le quartier est étonnamment calme.

Le calme convient au solitaire qui, vigilant, marche à grand pas. Après avoir longé la berge côté Tékelitt, la direction de la Grand Place des Départs est prise. Au moment de traverser le pont, une attention particulière est prise pour s'assurer de ne pas être suivi, ou devancé.

Après la Grand Place des Départs, c'est la direction du comptoir des maitres des routes pour, enfin, aller frapper à la porte de la demeure de Jérémiah.

Peu de temps après la frappe, le judas s'ouvre et laisse apparaître les mêmes yeux humains que la fois précédente.

"Que puis-je pour vous, Shaloar ?", demande l'individu d'un âge prononcé en fixant le massif Léodra.

" Salut "

Répond le solitaire surpris que le portier n'ai pas retenu son nom depuis ce matin, ou marque une volonté de mépris.

" Jérémiah est présent ?. ".

En insistant bien sur les deux premiers mots, l'humain répond aussitôt :

"Maître Parécos ne daigne pas faire savoir sa présence à n'importe quel passant. Quelle est donc la raison de votre interrogation, Shaloar ?"

Le regard indique bel et bien une certaine forme de reproche.

" Ah.. "

Reponds le Léodra essayant de trouver un aplomb de convenance.

" Faite savoir à Maitre Parécos que le sauveur de la cité est à sa porte. Merci. "

Après une brève observation des réactions, le sauveur porte une vigilance de prudence sur les alentours.

"Maître Parécos en sera informé", déclare l'individu, d'une voix un peu hautaine.

Et le judas est refermé.

Ensuite, le massif Shaloar peut entendre de l'autre côté de l'issue des pas s'éloigner de la porte.

Le massif guerrier s'adosse au mur à côté de la porte, pour avoir un panoramique sur les rues, tout en restant proche de la porte afin d'entendre quand le judas va s'ouvrir de nouveau. Vue le peu d'entrain du portier, l'attente risque d'être plus ou moins longue, alors le shaloar se prépare à patienter.

Contre toute attente, et heureusement vu le peu de changements dans les environs du Léodra, les pas reviennent peu de temps ensuite. Le judas est réouvert et les mêmes yeux s'y encadrent, cherchant dans la rue...

La rapidité du retour ravi le sauveur quelque soit la réponse. Le shaloar se montre dans l'entrevue du judas dès qu'il en perçoit l'ouverture et attend.

Le judas est alors refermé et la porte grande ouverte. Le domestique en livrée de majordome s'écarte du passage, en tenant la porte écartée. Il s'incline et annonce :

"Maitre Parécos vous attend."

Grage peut distinguer un couloir droit se terminant en T. Deux portes fermées se font face en son milieu. Une troisième porte fermée attend au fond du couloir. Divers bibelots sont exposés sur des étagères de bois décoré le long du couloir.

Comme à l'accoutumé, l'entrant facilite au mieux le travail du portier. Dans son mouvement, un hochement de tête est fait à l'attention de l'accueillant pour le remercier.

Une fois à l'intérieur, après un bref coup d’œil, le guerrier commence par retirer son casque pour faire flotter sa crinière quand la porte est fermée. Le casque est accroché à la ceinture tandis que les consignes du portier sont attendues.

Le majordome referme la porte aussitôt derrière le massif Shaloar. Et referme les verrous prestement, avec l'aisance apportée par une grande habitude.

Aussitôt après, le domestique dépasse son magistral invité et l'invite du geste à le suivre. L'homme remonte le couloir et tourne à droite. Dès que le Léodra noir arrivera au terme de l'allée centrale, il constatera que le couloir transversal contient trois portes. Celle au bout du couloir d'entrée et deux autres issues dans le même mur, une de chaque côté. Un escalier montant trône au bout du couloir à gauche, et il forme un coude pour repartir dans le sens opposé à mi-hauteur de l'étage supérieur.

Le majordome se dirige vers la porte plus à droite, frappe deux coups, attends le "Oui..." prononcé par Jérémiah et ouvre la porte en restant dans le couloir. Ce faisant, il s'incline en direction de la personne qui le suit.

Le guerrier emboite le pas du majordome dès perception de la consigne visuelle, lui laissant une enjambée d'avance. Chemin faisant, l'invité retire ses gantelets pour les accrocher à sa ceinture.Des points de repères sont pris à l'intérieur des lieux, au cas ou.

L'inclinaison du majordome est un peu surprenante pour le réprouvé qui n'est pas habitué à tant de faveurs. Un nouveau hochement de tête martial s'en suivra en guise de remerciement silencieux avant d'entrer d'un pas décidé dans la pièce indiquée.

Grage entre alors dans un petit salon, entièrement meublé autour d'une table basse et de multiples fauteuils. Des tableaux sont accrochés aux murs, représentant différents points de vue de Tradisgantia par des peintres différents. Ici aussi, divers objets d'art sont placés sur des présentoirs aux coins de la pièce.

Confortablement assis dans un des fauteuils, Jérémiah boit une tasse d'infusion. Dès qu'il l'aperçoit, il accueille le massif Shaloar avec un sourire avenant. Puis d'un geste ample, il invite Grage à choisir son siège :

"Bienvenue dans mon humble demeure, Sauveur de la Cité !"

Après son rapide panoramique de la pièce, c'est le borgne qui est regardé de la tête aux pieds, histoire d'être certain qu'il va bien.  Et si tout va bien, alors le sourire paraît enfin sur le visage du carnassier.

" Merci. "

Répond le jeune debout accompagnant son propo d'un signe de tête amical. Les fauteuils sont régardés sans grand intérêt, à moins qu'un tabouret ne soit vue. Les murs sont aussi regardés, mais la décoration ambiante ne doit pas permettre de s'y adosser.

" C'est richement décoré chez toi. Tu collectionnes ce qui a trait à la cité ? "

Grage ne repère ni tabouret, ni portion de mur libre.

Le borgne sourit en regardant rapidement les différentes pièces servant de décorations. Le jeune Léodra peut remarquer que le Maitre des Routes porte des vêtements chauds plus commodes en extérieur qu'en intérieur. Seul le pardessus ou la cape-manteau lui manque.

Puis Jérémiah répond en souriant :

"Non, pas seulement. De nombreux objets présentés ici ont été acquis pendant mes voyages passés. Ils font office de souvenirs..."

L'invité hésite tout d'abord, puis s'installe dans un fauteuil, l'arrière train sur le bord de l'assise et le sac reposant sur l'accoudoir. Une fois satisfait de sa posture, le maitre des routes est regardé et le jeunot reprend.avec une pointe de nostalgie dans la voix :

" Les souvenirs, la mémoire, c'est important. Tu as raison. "

Puis en regardant les vètements de son hote, la suite se fait avec curiosité

" Tu t'apprètes à sortir ou tu viens d'arriver ? "

Jérémiah soupire et répond sans se faire attendre :

"Je viens seulement de rentrer. J'ai du patienter après les intempéries avant de pouvoir revenir. Fort heureusement, l'orage a été plutôt court."

Il retrouve rapidement le sourire et demande aussitôt :

"Pas trop de mal pour trouver ma demeure ?"

A la question, le jeune ne peut s'empécher de sourire amicalement en bombant le torse d'une petite fierté.

" Du premier coup ! "

Puis, portant son regard sur les décorations prédentes dans la pièce

" Si tout pouvait être aussi simple que trouver ta demeure. Ca va être plus compliqué de rentrer à fort Braise en évitant les gouttes... "

Le sauveur lache un p'tit pouf de rire  avant de reprendre.

" Dit, ca sert à quoi les tableaux de Tradisgantia ? Il suffit de se promener en ouvrant les yeux pour voir ça. "

Le guerrier pointe d'un doigt les toiles qui représentent les points de vue de la cité.

Jérémiah a tout d'abord un sourire en coin, puis il répond affablement :

"Ces peintures montrent une partie de ma cité à un point donné dans le temps. Si tu vas voir les lieux représentés aujourd'hui, tu pourras noter ici et là quelques différences. Voire des changements conséquents.

L'intérêt de ces toiles est de préserver l'exact souvenir des lieux représentés. Un intérêt qui grandira quand approcheront mes derniers jours. Et ces toiles pourront également servir de témoins à mes descendants."

Le massif assis opine à plusieurs reprises de la tête pendant la première réplique, regardant plus attentivement les tableaux.

Quand le maitre des routes a terminé son discours sur ses vieux jours, la shaloar réponds amicalement, sans faire de mauvais humour.

" Parce que tu crois que ça va leur plaire ? "

Le regard se porte sur le borgne, fixant l'oeil invalide quelques instants et avant qu'une réponse ne se fasse entendre, l'homme lion reprend.

" Ah bah oui, j'suis distrait.

Je ne vois que Tradisgantia. Les autres citées que tu as vue sont-elles plus moches encore ? "

Jérémiah a un petit sourire blasé quand il secoue la tête négativement. Puis il répond tranquillement :

"Le fait de leur plaire n'est pas le sujet de ces toiles. Il s'agit d'un témoignage."

Son sourire s'accroit tandis qu'il poursuit :

"Et en parlant de voir, je constate que tu es resté un parfait petit maraudeur inéduqué pour sortir de pareils commentaires. Enfin... si tu observes correctement, tu trouveras au sein de ma demeure des représentations d'autres cités que j'ai pu visiter."

Le shaloar sourit à l'évocation d'être un parfait petit maraudeur, ce qui est partiellement vrai, surtout en matière d'art.

" J'espère avoir l'occasion de voir les toiles des autres citées dans ta demeure. Cela pourra m'aider à m'en faire une idée. Je ne connais que les citadelles pour l'instant, et Tradisgantia. Et si mes contemplations peuvent être enrichies de tes récits, cela sera un plaisir à n'en point douter. "

Le jeune guerrier se tape les mains sur les cuisses.

" Mais bon. Avant de savoir si tu as du nouveau sur notre affaire en cours, j'aimerais savoir comment je dois t'appeler en public. Vu le regard foudroyant du portier quand j'ai demandé à voir Jérémiah, et ca façon d'insister sur Maitre Parécos, je préfère ne plus commettre d'impair. Alors, je t'écoute. "

Le sourire aux lèvres, le Maitre des Routes répond sans se faire prier :

"Tu peux me nommer Jérémiah lorsque nous sommes dans un cadre privé, comme ici. Mais en public, il est préférable que tu me nommes Maitre Parécos, car je suis un Maitre des Routes.

De ton côté, tu profites du titre de 'Sauveur de la Cité'. Cependant, prends bien garde au fait qu'il ne s'agit que d'un titre honorifique. En présence de membres titrés parmi les personnalités de la ville, cela ne te donnera aucun privilège. Alors mieux vaut ne pas provoquer de fautes d'étiquette."